Le vrai problème de la « punition collective » d’Israël | Conflit israélo-palestinien

En septembre 2006, j’ai effectué ma première visite au Liban, arrivé 34 jours après les 34 jours d’assaut de l’été par l’armée israélienne qui avaient tué quelque 1 200 personnes dans le pays.

Alors qu’il a été révélé par la suite qu’Israël avait planifié la guerre à l’avance, le prétendu casus belli était l’enlèvement transfrontalier de deux soldats israéliens par le Hezbollah, qui avait l’intention de les utiliser comme monnaie d’échange pour obtenir la libération des prisonniers arabes dans les prisons israéliennes.

J’avais 24 ans, et c’était ma première vue rapprochée du travail militaire israélien : des villages décimés, des ponts bombardés, des cratères dans le sol où se trouvaient autrefois des immeubles d’habitation.

Le romancier libanais Elias Khoury décrirait la scène comme suit : « C’est la dévastation. C’est une pure dévastation qui ne ressemble à rien que vous ayez jamais vu, à part la dévastation. Des ruines qui s’étendent jusqu’à l’horizon, défiant le ciel.

Mon amie Amelia et moi avons passé deux mois à faire de l’auto-stop à travers les décombres du Liban, à séjourner chez des étrangers bienfaisants et à être continuellement nourris de force conformément aux règles de l’hospitalité libanaise. Au moment où nous sommes partis, la «dévastation pure» était devenue tellement normalisée à nos yeux que les bâtiments intacts avaient commencé à sembler défigurés.

La guerre de 2006 n’est que l’une des nombreuses opérations israéliennes dénoncées par les organisations de défense des droits de l’homme et d’autres défenseurs désignés de l’éthique mondiale comme une punition collective, un crime de guerre au regard du droit international humanitaire. Selon l’article 33 des Conventions de Genève de 1949, « aucune personne protégée ne peut être punie pour une infraction qu’elle n’a pas personnellement commise ».

En effet, à première vue, la «punition collective» semble être une description assez appropriée pour raser des villages entiers, saturer un pays avec des millions de bombes à fragmentation et envoyer un hélicoptère d’attaque pour massacrer des enfants à l’arrière d’une camionnette.

Mais le terme n’atteint pas pleinement la cible – bien que je l’ai moi aussi reconnu l’avoir utilisé à plusieurs reprises.

L’implication demeure que c’est simplement la partie « collective » de la punition qui est le problème, et qu’Israël a toujours le droit, en principe, d’infliger une punition non collective au Liban. Ceci en dépit des propres antécédents criminels d’Israël dans le pays et de son rôle essentiel dans la création des conditions de la violence.

Certes, l’enlèvement de soldats est un « délit » plutôt décevant par rapport à l’invasion apocalyptique du Liban par Israël en 1982, qui a tué des dizaines de milliers de personnes et engendré le Hezbollah en premier lieu – ou avec l’occupation de 22 ans de torture sud du Liban qui a pris fin en 2000.

En parlant d’occupation, traversez la frontière sud du Liban vers la Palestine occupée et vous ne manquerez pas d’accusations de punition collective portées contre Israël par des experts des Nations Unies, Human Rights Watch, etc.

Encore une fois, la terminologie semble constituer une évaluation précise d’un panorama défini par des massacres militaires intermittents, le blocus asphyxiant de la bande de Gaza et la poursuite des démolitions de maisons en Cisjordanie. Au cours de l’été 2014, par exemple, l’armée israélienne a tué 2 251 personnes à Gaza sur une période de 50 jours, dont 551 enfants – une « pure dévastation », si vous voulez, qui aurait été en réponse aux tirs de roquettes du Hamas sur Israël .

Et pendant seulement trois jours en août de l’année dernière, dans une opération baptisée Breaking Dawn, Israël a présidé au massacre d’au moins 44 Palestiniens dans l’enclave côtière assiégée. Parmi les morts se trouvaient 16 enfants. Selon le gouvernement israélien, cette affaire sanglante était un acte « préventif » contre le groupe du Jihad islamique palestinien – ce qui soulève peut-être la possibilité morbide d’une nouvelle catégorie de « punition collective préventive ».

Mais encore une fois, l’accusation de « punition collective » est inadéquate du point de vue de la justice – suggérant comme elle le fait que la résistance palestinienne à l’occupation israélienne est une infraction fondamentalement criminelle et punissable, tant que la punition est infligée de manière non collective.

Après tout, la violence palestinienne ne se produit pas dans le vide. Cela se produit dans un contexte de 75 ans d’assujettissement, de dépossession, de nettoyage ethnique et de massacres israéliens. Les roquettes tirées depuis un territoire occupé, bloqué et bombardé sont une réponse à la violence israélienne.

En Cisjordanie, pendant ce temps, la démolition généralisée par Israël des maisons de « terroristes » palestiniens présumés doit évidemment être dénoncée. Et pourtant, ici aussi, l’accusation de « punition collective » implique la validité de la punition individuelle des Palestiniens dont les propres actions sont le résultat direct de décennies de politique israélienne barbare.

Ceux qui dénoncent les châtiments collectifs israéliens ont sans doute de bonnes intentions, mais on ne peut s’empêcher de se demander si l’utilisation de la terminologie finit par invalider le droit à la résistance.

Dans Le Guide Pratique du Droit Humanitaire, Françoise Bouchet-Saulnier – directrice juridique de Médecins Sans Frontières (MSF) – fait référence à une citation appropriée du philosophe et écrivain franco-algérien Albert Camus : « Appeler les choses par le mauvais nom ajoute à l’affliction du monde.

En terrorisant les Palestiniens, Israël ajoute déjà considérablement à l’affliction du monde. Et en l’absence de tout signe d’amélioration, il est peut-être temps de repenser notre façon d’en parler.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement la position éditoriale d’Al Jazeera.

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